Du Cap Vert au Cap Vert

LOL n°25

Mercredi 13 novembre

Et voilà, c’est le grand jour. Nous disons au revoir au Sénégal. Après quatre semaines d’un formidable séjour dans ce beau pays, accueillant, chaleureux, coloré, mais qui nous a également laissé parfois plein de perplexité et d’interrogation, il est temps de mettre les voiles.

Ainsi donc, à l’heure de lever l’ancre, les images de notre escale défilent sous nos yeux : la « Teranga » (dans la LOL précédente nous avions évoqué ce qui pourrait se traduire par la« convivialité innée et spontanée » des sénégalais), leur sérénité en toute circonstance, leur patience infinie, leur nonchalance désarçonnante aussi, leur fatalisme accablant enfin. Ahhh, il nous aurait bien fallu plusieurs semaines entières de plus pour saisir la culture de ce peuple, prendre le temps de rencontrer les gens en profondeur, explorer l’arrière-pays, se faire des amis. La tête est pleine de souvenirs, mais elle est aussi remplie de regrets : n’avoir pas poussé jusqu’en Casamance, ne pas avoir visité le parc du Djoudj, parc exceptionnel apparemment pour les oiseaux migrateurs situé au nord du Sénégal, ni le désert de Lompoul…ne pas avoir assez gouté à la cuisine sénégalaise, ni s’être fait faire une jolie robe …

Au moment de se quitter (1 jour et demi après la date fixée initialement, c’était écrit !), c’est l’heure des derniers aux-revoirs avec les amis du CVD, Tapha, Seydo, Ibou, Moussa, Diego etc.. Ils sont sincères et émouvants. On se formule des vœux : santé, travail, bonheur, chacun de ces vœux, ponctué de l’inévitable « inch’ Allah ». Tapha, qui nous a reçus chez lui et nous a permis de visiter l’école de ses enfants déclare solennellement « Je vous aime, vous êtes de vrais amis. » Le sentiment est réciproque, nous ne t’oublierons pas !

Grosse fatigue à bord

Jean dit au revoir à « Hutch », le chien de Mamadou « Toutoumiaou », avec lequel il a tant joué (et tant attrapé de puces sans aucun doute…) et ses recommandations sont aussi drôles que les nôtres étaient touchantes : « Prend bien soin de toi Hutch ! Sois sage et bien obéissant avec Ibou ! Et surtout ne crie pas ! » (On croirait qu’il nous pastiche !). Nous écoulons nos derniers francs CFA, regagnons notre bord, remontons l’annexe (une formalité avec nos nouveaux bossoirs : bonheur !) et rangeons les dernières provisions. Tout est prêt pour la traversée et notre future escale : dix gros bidons d’eau potable rangés sous notre table de carré, fruits, légumes, et farine en quantité pour faire le pain à bord. Lolita est chargée à bloc et cela se voit à sa ligne de flottaison, bien enfoncée.

Il est 13 heures. Après un pique-nique rapidement expédié, nous levons l’ancre, hissons les voiles. Au revoir Dakar, au revoir Sénégal !

Et nous voilà en mer. Nous quittons rapidement la Baie de Hahn (ah si seulement tu pouvais redevenir la plus belle plage de Dakar, et accueillir tes visiteur des mers de manière plus agréable, combien de bateaux afflueraient pour venir te saluer !), frôlons l’île de Goré, contournons la Corniche (pointe sud-ouest de Dakar, le cœur de la capitale sénégalaise), longeons la côte sud-ouest jusqu’aux Mamelles, saluons le surprenant (restons polis…) monument de la Renaissance africaine, apercevons l’ile de Ngor, et prenons le large cap sur les îles du Cap Vert, au 290° de notre compas. La presqu’île de Dakar, dite du « Cap Vert » disparait dans la brume.

un pigeon voyageur fait une petite pause à bord

L’après-midi s’écoule paisiblement, entre siestes, musiques, jeux, évocation de souvenirs mais aussi… quelques éclats de voix. Ca bouge un peu, mais l’équipage reste vaillant. Jean a beau vomir, il ingurgite aussi sec après une bonne plâtrée de pâte, ce qu’il n’aurait raté pour rien au monde. Enfermé dans sa cabine, comme un ours dans sa tanière, Pierre-Louis dévore, littéralement captivé, le dernier tome de Harry Potter, enfin téléchargé sur sa liseuse. Juliette quant à elle, mène sa vie de diva, chantonne, dessine, se fait des tresses, aide en cuisine… et asticote son monde.

Trois jours de navigation tranquilles, à une allure agréable et parfaite pour notre bateau qui a pu allonger la distance malgré les vents faibles du début. Le dernier jour, les Alizés se sont renforcés et nous avons contourné rapidement le Nord de l’île. Nous ne souvenions pas qu’il y avait tous ces volcans sur Sal, et l’arrivée à Palmeira nous surprend car l’île s’est dotée en vingt ans de véritables infrastructures maritimes, avec belle digue accueillant mini vraquiers et petits porte-conteneurs. Pendant la navigation, l’équipage a accusé le coup des derniers jours à Dakar (couchers tardifs, levers matinaux). La fatigue côté enfant s’est faite sentir par un énervement, un niveau sonore et de mauvaise humeur assez élevé tandis que nous, parents, reprenions avec difficulté la routine des quarts de nuit. Heureusement que le trafic maritime n’est pas bien important dans cette zone, et qu’il n’y a eu aucune manœuvre à effectuer sur le bateau car nous avons (beaucoup) dormi – en mode solitaire quand même (c’est-à-dire avec un réveil toutes les 10 min)  

Ca progresse (un peu) en ukulélé
Burger maison avec pain maison (copieux !)

Trois jours plus tard, lorsque nous jetons l’ancre en baie de Palmeira sur l’Ile de Sal, nous sommes dans un nouveau monde. Notre escale dakaroise nous parait déjà relever d’un autre temps. A l’arrivée dans la baie de Sal nous sommes accueillis par Jay, un cap verdien qui parle un peu français et nous renseigne sur les services du port ; « NO STRESS » semble le maître mot sur l’île.

La paperasse d’entrée rapidement expédiée, nous partons en quête des incontournables : la monnaie locale, les escudos (inutile, on peut payer partout en euros) et le carte SIM locale pour éviter de se retrouver avec des notes de téléphone « odieuses » (j’ai un peu raté le coche à Dakar). Très vite nous décidons de ne pas nous éterniser à Sal même si nous hésitons encore sur la suite du programme. Tout en discutant dans les rues de la petite ville, dont le cœur n’a finalement absolument pas bougé en 20 ans (mêmes devantures décaties, mêmes bouibouis), nous croisons un groupe de personnes de tous pages, sourire béat aux lèvres, guitare en bandoulière. Ce sont des chrétiens « évangélistes ». Nous pensons qu’ils se rendent à l’office et ils nous proposent de les suivre, jusqu’à ce que nous réalisons qu’ils viennent d’entamer une tournée d’évangélisation de Palmeira ! Prêches et lectures se succèdent auprès des passants sensibles à la Bonne Nouvelle.  Alors que la troupe atteint les faubourgs, il est temps de les laisser à leur mission. Ces sourires font du bien, car les personnes que nous avons croisées ne brillent pas par leur joie de vivre. Pas de doute, la Teranga sénégalaise est loin, nous sommes rentrés de plain-pied dans la Saudade Cap Verdienne (nous y reviendrons). Bien sûr il faudra un peu de temps et des rencontres pour s’en imprégner.

Allez, une douche et au lit ! Une bonne nuit de repos s’impose à tout l’équipage !

Palmeira, le petit port de pêche de Sal
Mouillage à Palmeira, Lolita est l’un des plus proche du rivage

Dimanche 17 novembre

Qu’il est bon…de dormir ! La vie semble plus légère et tout le monde de meilleure humeur. Après une matinée de ménage, et oui ma bonne dame – Lolita en avait VRAIMENT bien besoin après la poussière de Dakar et notre vie quotidienne un peu décousue ces derniers jours – et un bon déjeuner, nous mettons le cap sur Santa Maria, la station balnéaire de l’Ile. Avec grand bonheur les enfants découvrent les ALUGUER (littéralement « à louer »), le véhicule de transport collectif emblématique du Cap Vert qui fait concurrence au combi collectif (Aluguer également). L’intérêt c’est de foncer cheveux au vent à l’arrière du pick-up. Un must ! Surf, kite, les plages de l’Ile sont désormais bien exploitées par les tours opérateurs et les adeptes de glisse. Les enfants s’en donnent à cœur joie dans les rouleaux. Nous rêvons d’une session kite ou funboard, mais n’avons pas embarqué tous ces jouets sur LOLITA.

Au retour à Palmeira, le quartier se prépare à une soirée dansante typique du Cap Vert, musique à fond jusqu’à pas d’heure. Les nageurs tombent de sommeil, ce sera pour une prochaine fois !

Cheveux au vent en Pick-up « Aluguer »

Lundi 18 novembre 2019

C’est le grand retour d’une matinée « classe » à bord de LOLITA. Difficile de se concentrer mais nous persévérons…En descendant à terre pour déjeuner et récupérer les papiers du bateau au commissariat, nous tombons sur l’équipage de BOOMERANG qui est arrivé hier des Canaries après quelques jours de navigation « engagée » sur le joli catamaran Brazzapi (plan Lerouge) Les enfants sympathisent immédiatement avec Charles et Camille (7 et 11 ans) et les parents, Stéphane et Geneviève, nous invitent pour un apéro à bord. Le petit mouillage au Sud de Sal attendra bien demain ! Ce déjeuner à terre nous donne l’occasion de déguster notre premier thon et le Garupa, mérou local à la peau rouge et à la chair si fine. Le festival du poisson s’est prolongé tard dans la nuit à bord de Boomerang, tant nos hôtes sont de fins gourmets (dégustations de limandes et murènes). Nous passons une excellente soirée à bord, Stéphane et Geneviève ont une (des) histoire (s) incroyable (s) et naviguent sur un cata très soigneusement préparé pour un tour du monde. C’est drôle car ils me rappellent que nous nous sommes déjà rencontrés dans une précédente vie professionnelle.

Mardi 19 novembre 2019

Ce matin, il faut beaucoup se motiver pour lancer l’école à bord, nous sommes un peu KO du fait d’un petit virus sans doute, à moins que ce ne sois un souvenir dans la nourriture de Dakar (non non, je vous vois venir, nous avons été raisonnables hier soir !) Depuis que nous sommes arrivés il fait…gris, et frisquet le soir ! Nous trouvons l’eau presque fraîche. N’exagérons rien non plus, on parle de 26° au lieu de 30°.

Si bien que notre séjour à Sal trouve une double bonne raison de se prolonger. L’après-midi nous partons en compagnie de l’équipage de Boomerang visiter les hauts lieux touristiques de SAL. D’abord les salines de Pedra de Lume. Dans les salines, comme dans la Mer Morte ou le lac Rose du Sénégal, les enfants se baignent dans l’eau ultra salée et constatent qu’ils flottent et ne peuvent nager dans l’eau ! Seul bémol, Juliette ressort en hurlant car des petites irritations mal placées se transforment vite en petit supplice lorsque le sel pénètre les lésions. Ca raisonne un peu dans le cirque (un ancien cratère) qui entoure les salines. Heureusement il y a une douche à proximité, ouf, la pauvre… Direction ensuite « Shark baye » une crique de la côte est, où l’on peut marcher dans une sorte de nurserie naturelle pour des requins citrons. Tandis que les parents veillent à 50m de là (ailerons bien visibles et dissuasifs !) nous évoluons dans 40cm d’eau parmi les bébés requins. Joies, exclamations, bonheur ! les enfants enfilent les lunettes pour mieux observer les petits spécimen. Ce matin, nous en avons justement aperçu un adulte de 2m ramené par les pêcheurs de SAL.

Demain nous pensons quitter Palmeira pour un autre mouillage, en espérant l’équipage remis sur pied.

7 réflexions sur “Du Cap Vert au Cap Vert

  1. Camille Gavériaux

    Merci les petits chéris pour toutes ces nouvelles ! Prenez bien soin de vous 5. Dites-moi si vous voulez des références de livres pour la liseuse ( mes empereurs experts se feront une joie de tuyauter les votres). Baisers fuerte

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  2. Lydie

    La belle aventure continue !! Petite question : la murène est consommée !!! Est-ce bon ?
    Votre réservoir d’eau est irrécupérable ?? C’est tenace le carburant 😬.
    Allez vous faire un sapin 🌲 ? Nous sommes en plein préparatifs de Noël de notre côté !! Je pense fort à vous !!! Bisous

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    1. Bonjour Lydie,
      Pour répondre à tes question, la murène, c’est délicieux panée cuit en friture !
      Concernant le réservoir d’eau : il y a toujours un petit goût de gasoil. C’est tenace en effet ! Alors même que nous avons récuré ledit réservoir pendant notre escale à Dakar. Hypothèse : il faudrait que nous changions aussi toute la tuyauterie… mais pour cela nous attendrons la Martinique (nous avons trouvé des tuyaux à Dakar qui semblent de moins bonne qualité)
      De toutes façons nous buvons désormais l’eau en bouteille par la force des choses et aussi parce que nous ne pouvons plus produire notre eau via le dessalinisateur qui refuse de fonctionner. Problème à résoudre aussi de l’autre côté, le SAV du fabricant nous attend là bas. Nous sommes un peu déçus par ce matériel !
      Enfin, nous n’avons pas encore commencé les décos de Noël mais avons acheté une couronne dans une boutique tenue par des chinois qui ont un large choix de déco. Nous opterons peut être par une feuille de palmier et des décos « maisons » mais vous tiendront au courant.

      Sinon Pierre-Louis avait un message pour l’accueil :
      Salut tout le monde,j’espere que vous allez bien .A Sao Nicolau (dites san nicolao) tout va très bien. Nous avons fait de la plongée et on a vu plein de poissons. Si vous etes en plein préparatif de Noel ,je vous le souhaite joyeux. Bises Pilou

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